Pierre
AMBROGIANI

(1907 - 1985)

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Oeuvre indisponible à la vente

La mort du poète, 1966-67

Huile sur toile, signée en bas à gauche
160 x 130 cm

Expositions :
Les peintres témoins de leur temps, 1967 (Grand Prix) 
Pierre Ambrogiani, Peintures récentes, Galerie Paul Ambroise, Paris, mai-juin 1968, reproduit au livret d’exposition. 
Pierre Ambrogiani, Cinquante années de vie artistique, Musée de la Vieille Charité, Marseille, avril-mai 1973, reproduit au catalogue d’exposition sous le n°81. 
Pierre Ambrogiani, Le gourmand de couleurs, Fondation Regards de Provence, Palais des Arts, Marseille, 8 mai - 31 août 2008.

Bibliographie :
André Alauzen, Pierre Ambrogiani, Editions Tacussel, 1985, reproduit en p.33 sous le n°11.

 

 

En 1967, Pierre Ambrogiani est présent, comme à son habitude, au Salon des peintres témoins de leur temps, exposition annuelle fondée par Isis Kischka en 1951 et qui se tient au Musée Galliera. Il y présente cette toile spectaculaire intitulée La Mort du Poète. 
Le thème annuel choisi pour l’exposition étant « la chanson », le tableau d’Ambrogiani fait écho à une composition musicale interprétée par Gilbert Bécaud, « Quand il est mort le poète », sur des paroles de Louis Amade. Le sujet est donc funèbre… et pourtant, l’air léger de la chanson comme le tableau, à forte dominante jaune, sont tous deux étonnamment lumineux. 

Quand il est mort le poète, 
Tous ses amis, 
Tous ses amis pleuraient. 

Quand il est mort le poète, 
Le monde entier,
Le monde entier pleurait. 

On enterra son étoile, 
Dans un grand champ, 
Dans un grand champ de blé. 

Et c'est pour ça que l'on trouve, 
Dans ce grand champ, 
Dans ce grand champ des bleuets.

Si la chanson a probablement été écrite en hommage à Jean Cocteau, qui avait pris publiquement la défense de Gilbert Bécaud critiqué par des journalistes, le poète du tableau d’Ambrogiani pourrait être l’un des chers amis qui ont accompagné le peintre tout au long de sa vie, comme Francis Carco, disparu quelques années plus tôt. 
Ambrogiani vieillit aussi, la fougue de la jeunesse l’a quitté et autour de lui, les bancs se vident et les adieux se succèdent. L’année précédente, au même Salon des peintres témoins de leur temps, n’avait-il pas présenté une toile qui avait pour sujet l’enterrement d’Auguste Chabaud? Preuve que le sujet de la mort le préoccupe particulièrement en cette fin des années 1960.

Pourtant, cette composition magistrale dans laquelle le cortège funèbre se déroule tel un ruban chamarré qui s’élève en direction du ciel, le poète en tête, est plutôt une ode à la vie, avec ses couleurs éclatantes sur ce fond presque doré, qui rappelle à la fois le champ de blé et l’étoile de la chanson. Pas de lamenti dans cette procession, le tragique est mis à distance pour magnifier l’étoile du poète, la lueur qui rejaillit en brillant halo sur le monde. La vie l’emporte toujours chez Ambro. 

Cette année là, Pierre Ambrogiani rafle le Grand Prix décerné par le jury des Peintres témoins de leur temps et Jean Marin lui décerne sa récompense qu’il accompagne de ces mots :

«  Quand il est mort le poète
On enterra son étoile 
Dans un grand champ de blé… 

Et voilà qu’autour du « Poète mort », autour du « grand champ de blé » où « on enterra son étoile », Pierre Ambrogiani déroule le cortège des admirateurs du poète : cortège claquant d’étamines composé de silhouettes recueillies et ferventes. Cortège dont l’orbe mouvant et coloré va enfermer, dans la fidélité des présences humaines, le retour solennel de la moisson rouge et or. C’est le tableau de la Piété plus que de la douleur ; ce sont les Rogations de croyants qui pensent davantage à la promesse de la survivance qu’à l’accident de la disparition. 
Sur votre toile, tout est en marche, tout est en mouvement ; on y pressent qu’un jour l’Etoile, passagèrement enfouie, s’élèvera du sein de la terre. 
Les amis du poète s’apprêtent déjà à lever leurs yeux de la tombe pour les porter vers cette lumière qui aura pris enfin sa place au ciel méditerranéen, dont vous êtes. 
Pierre Ambrogiani, avec les plus grands, le somptueux Porte-Couleurs. »